L'illusion de l'ego


Bienvenue


Ce blog est écrit sous forme de dialogues.
Il cherche à percer l'illusion d'un moi fixe.


Comment ?
Grâce à un jeu.
Un jeu d'observation.
Un jeu de questions.
Une seule règle.
Observer directement et répondre personnellement.

Et après, que reste-t-il ? 
A toi de voir   ;-)

Un ami



Si vous êtes une femme, lisez l'article: Questions à une amie
Si vous êtes un homme, lisez l'article: Questions à un ami

Questions à un ami

       

                     L'ILLUSION DE L'EGO





“ Lourd est le parpaing de la réalité sur la tartelette aux fraises de nos illusions.”
                                                                                         Boulet, Notes, tome 3








                               CHAPITRE I





Aimerais-tu connaître la réponse à la question "Qui suis-je ?"

Oui, j'aimerais bien, comme tout le monde.

Sais-tu ce qu'il faut faire pour cela ?

Je n'en ai aucune idée.

Eh bien, commençons par observer les pensées.
D'où viennent-elles, ces pensées ?
Regarde.

Je ne sais pas. J'ai l'impression qu'elles apparaissent spontanément.

Est-ce toi qui les crée volontairement ?

Non, c'est automatique.

Peux-tu les arrêter aussi longtemps que tu le veux ?

Je ne peux pas, elles reviennent toujours.
Si j'essaye d'arrêter de penser, j'y arrive quelques secondes, pas plus. Je vois que les pensées apparaissent en fonction des circonstances.

Et les émotions, es-tu capable de ne pas les ressentir ?

Non, c'est impossible.

Respires-tu ou est-ce que respirer se fait naturellement, sans ton contrôle ?

La respiration se fait toute seule, automatiquement, la plupart du temps.

Exactement, tout marche très bien sans toi.
Ton cœur bat sans toi. Tes ongles poussent sans toi, tes cheveux aussi.
Le sang circule et les muscles se contractent mais tu n'y es pour rien.
Tu ne sais même pas comment tout cela fonctionne.
Regarde encore.

Le soir, choisis-tu le moment exact où tu t’endors ?

Non, je ne peux pas.Je me couche et j'attends de sombrer dans le sommeil.

Pourtant, tu dis : " Je m'endors " comme si tu étais capable de t'endormir toi-même.
Et le matin, est-ce toi qui choisis de te réveiller ?

Le réveil naturel se fait tout seul quand j'ai assez dormi.
Je n'ai aucun contrôle sur ça.

Revenons aux pensées. Peux-tu bloquer leur apparition ?

Cela semble possible si je mets toute mon attention mais ça ne dure pas.

Exactement. Tu te dis: "Allez, j'arrête de penser ". Tu mets toute ta volonté pour obtenir ce contrôle et ça semble marcher. Mais, petit à petit, l'attention se relâche, attirée par d'autres choses, un bruit, une sensation ou un souvenir. Et voilà qu'arrive tout un tas de pensées que personne n'a choisies. Alors tu te dis : " Zut, je ne peux pas contrôler mes pensées ".
Spontanément, elles reviennent. Après une minute ou après une heure, elles reviennent. Personne n'est là pour les créer ou les bloquer.

Pourtant, j'ai la sensation d'être le penseur des pensées.

Alors, pourquoi ne choisis-tu pas toujours de belles pensées positives ? As-tu donc si peu de contrôle sur tout ce qui t'arrive ?

C'est vrai, je ne m'endors pas moi-même, je ne me réveille pas moi-même, je ne contrôle ni la respiration, ni la digestion, ni l'apparition des pensées. Et pourtant, "Je respire", "Je mange", "Je pense". Que se passe-t-il au juste lorsque "je pense" ?

Une pensée apparaît, puis une autres, puis encore une autre. Elles s'enchaînent, naturellement, sans toi. Dès que l'attention se porte sur cette activité,  je est ajouté. Ainsi l'action de penser devient je pense. Toutes les pensées se rapportent alors à un je qui les pense.
Mais est-ce vrai ? Y a-t-il vraiment quelque part au milieu du cerveau un je distinct qui pense, qui respire, qui mange ? Comme tout se rapporte à lui - je pense, je mange, je vois -, ce je doit être plus que des pensées, plus que des actions, plus que des perceptions, as-tu cette impression ?

Oui, j'ai l'impression d'être là, au centre. Il y a moi et mes pensées, moi et mes actions, moi et mes perceptions. Est-ce cela l'illusion de l'ego ?

Oui, c'est une illusion puissante, irrésistible mais surtout essentielle.

Pourquoi ?

Parce qu'elle nous offre une chose extraordinaire : La conscience de soi, ce sentiment d'être une unité, de rester identique à nous-même malgré le temps qui passe. L'ego est un processus naturel, très important pour développement et l'équilibre du corps et de l'esprit.

La conscience de soi peut-elle se dérégler ?

Cela arrive. Un traumatisme crânien, une dépression, la sclérose en plaques, la maladie d'Alzheimer, un hallucinogène dissociatif, peuvent entraîner une dépersonnalisation.

Le sentiment d'identité se brise alors, comme si l'ego avait disparu.
Ce trouble de la perception de soi donne une impression d'irréalité et d'étrangeté touchant soi-même (la dépersonnalisation) et, parfois, le monde environnant (la déréalisation).
Cet état n'a rien d'enviable.

De même, la schizophrénie peut entraîner la perte d'une conscience de soi stable, distincte d’autrui. Une personne atteinte de ce trouble peut parfois attribuer à un autre, ses actes, ses pensées, et même sa « voix intérieure ». Là encore, cet état n'a rien d'enviable.

Par contre, dissiper l'illusion d'être un moi fixe, stable et continu peut être un vrai soulagement. 

ça m'étonnerait !

Essaye et tu verras.

D'accord, le corps entier, des muscles au cerveau, n'a pas besoin de moi pour fonctionner. Je vois aussi qu'on ne peut pas désigner une partie du corps, une pensée, un souvenir, une émotion ou tout autre constituant de la personnalité et dire : " ça y est ! j'ai trouvé, ça, c'est moi ". Tout se rapporte à moi mais, hélas, rien ne me désigne exclusivement.

 David Hume, un philosophe écossais du XVIIIe siècle a fait le même constat.



« Quand j’entre le plus intimement dans ce que j’appelle moi-même, je bute toujours sur une perception particulière, de chaud ou de froid, d’amour ou de haine, de douleur ou de plaisir. Je ne peux jamais, à aucun moment, me saisir moi-même sans une perception, et jamais je ne puis observer autre chose que la perception. »

Mais où suis-je, alors ?

Te voilà face à un problème. Tu as beau chercher celui qui agit, perçoit ou pense, tu ne tombes que sur des actions, des perceptions et des pensées. Alors où es-tu, en effet ?

Serais-tu encore toi-même si tu perdais un bras, une jambe ou un demi-litre de sang ?

Oui, je serais toujours moi.

Donc, tu n'es ni les bras ni les jambes, ni la peau ou les cheveux, ni la forme du corps ou la voix, ni  le sang ou la salive, ni  les yeux ou  les dents, ni l'estomac ou les poumons, ni le cœur ou les neurones.

Tout cela change et se renouvelle, et toi, tu restes le même.
Comment est-ce possible ?

Voilà l'illusion de l'ego ?

Oui.

L'impression d'être une personne fixe, d'être le propriétaire du corps, de pouvoir dire : mes cheveux, mes pensées, ma salive, c'est donc une illusion ?

Oui. La conscience de soi ne repose pas sur la réalité mais sur une construction, sur une convention. Le plus important n'est pas ce que nous sommes mais ce que nous pensons être.

Regarde.
Toute la journée, sans y penser, tu avales de la salive. C'est naturel. Tu en produis un litre par jour. Mais, imagine, si, au lieu de l'avaler, tu crachais cette salive dans un grand verre. Pourrais-tu la boire tranquillement en fin de journée ?

Je ne crois pas, non !

Pourquoi ? C'est la même substance. C'est bien ta salive.
Alors quelle est la différence ?

Une frontière a été franchie. 

Oui. Ce qui sort de notre corps devient aussitôt étranger et suspect. Nous rejetons cette salive qui ne fait plus partie de nous-même.

Ce que nous appelons soi et non-soi n'est pas fixe. La seule chose qui ne varie pas, c'est ce sentiment d'être identique à soi-même, d'avoir un moi fixe, stable mais c'est une illusion.

Je comprends mais je ne suis pas convaincu. Je ne peux pas être les émotions, elles passent, ni les pensées, elles changent, ni les souvenirs ils s'effacent. Mais je suis bien celui qui parle, celui qui fait des choix !

Prenons un exemple alors. Tu choisis d'acheter un pull.
D'où vient cette décision ? D'un  je fixe, indépendant, trouvable ?

...
Il me semble que c'est le résultat de pensées. Le pull est bien coupé”, La couleur est sympa”, Le prix est correct”, par exemple.

Oui, il y a aussi une sensation agréable lorsqu'il est porté. Tout cela forme la décision de l'acheter. Ce n'est qu'ensuite qu'apparaît la pensée  “ je décide d'acheter ce pull ”.

Ainsi, il n' y a pas de je fixe à l'origine de cette décision, juste des pensées, des sensations ou des émotions qui conduisent à ce choix.

Oui, il n' y a pas quelque part au fond du cerveau, un je caché dans son coin, prêt à choisir ce pull.

Je est posé sur chaque expérience. Une décision est prise ... je décide , une parole est prononcée ... je parle, un choix est fait ... je choisis.

Que suis-je alors ? Rien ?

Rien ! Non bien sûr mais un moi fixe sûrement pas.















                              CHAPITRE II





Maintenant, regarde bien.
Est-ce toujours le même je dans les expressions suivantes ?
Je transpire, je suis en colère, je comprends, je mange, je me souviens.

Oui, c'est toujours moi ! C'est bien le même "je" dans toutes ces situations.

Comment est-ce possible ? Ces expériences n’ont rien à voir entre elles mais, toi, sans hésitation, tu les attribues au même je.
Qu’est-ce qui te donne l’impression d’être un moi unique et permanent ?

J'ai un corps identifiable.

La plupart de nos cellules meurent et disparaissent au bout de quelques jours, quelques mois ou quelques années pour être remplacées par d’autres. Même la forme du corps n'est pas stable, elle se modifie au cours du temps, lorsque l'on passe l'enfance à l'âge adulte. Quoi d'autre ?

J'ai des souvenirs personnels.

Tu as des souvenirs mais es-tu un souvenir ?

Non, je ne suis pas un souvenir. Tous les souvenirs sont rattachés à moi, toutes les pensées aussi, toutes les sensations également. Quand je me brûle, personne d’autre n’en ressent la douleur. C'est ma brûlure.

Ton corps, ta brûlure, ton esprit, tes pensées, tes souvenirs, tout se rapporte à toi. Mais toi, où est-tu ?

J'ai l'impression très nette d'être situé dans mon corps. Je sens que j'occupe mon corps et j'ai la conviction de le posséder et d'agir par son intermédiaire. C'est mon corps, et je le contrôle.

Cette impression, si puissante, si évidente ne serait-elle pas l'arbre qui cache la forêt ?



L'arbre du je, toujours semblable à lui-même, ne serait-il pas créé pour cacher une forêt variée de perceptions, d'émotions et de pensées ?

Continuons à chercher.
Où te trouves-tu dans le corps physique ?
Lorsque tu dis : " J'ai mal ", qu'est-ce que cela veut dire ?

Cela signifie qu' une douleur est ressentie dans le corps.

Mais comment un  je vraiment indépendant pourrait avoir mal ?
Et quand tu dis : " Je suis assis "  ?

Eh bien, il y a la sensation d'être assis et la pensée "Je suis assis" apparaît.

Mais comment un je distinct du corps pourrait être assis ? C'est impossible.
Si cette impression d'être une unité est réelle, si ce sentiment d'avoir un moi fixe est vrai, comment ce je peut-il, tour à tour, penser puis transpirer, comprendre puis manger ? Une fois c'est le corps, je mange, une fois c'est l'esprit, je pense. 

Cette impression d'unité est une illusion ?

Oui.

J'ai pourtant la conscience d'être là, bien vivant.

Alors, regardons cette pensée : j'ai conscience d'être en vie. Que signifie-telle ?

Diverses informations arrivent au cerveau. Par exemple, la position du corps dans l'espace, la température ressentie, la pression exercée sur la peau, la fatigue musculaire, la sensation de faim ou de soif. Il y a aussi en permanence des sons perçus, des images vues.

Plein de sensations physiques sont perçues continuellement. La langue touche les dents : sensation. La main passe dans les cheveux: une autre sensation. Les doigts grattent la cuisse : encore une. L'estomac gargouille, nouvelle sensation d'être en vie.

Alors que fait le cerveau de toutes ces informations ?

Il semble les unifier derrière une seule bannière :  je 

Exactement, le cerveau maintient en permanence cette illusion du moi. Il crée le sentiment d'un je fixe et en fait le personnage central de l'histoire. Mais, y a-t-il vraiment quelqu'un, caché là, au milieu du cerveau, attendant tranquillement l'apparition des sensations, des émotions et des pensées ?

Observe de près.
Une émotion apparaît. La tristesse par exemple.
Il y a des sensations dans le corps : l'envie de pleurer, un manque d'énergie. Dès que l'attention se porte sur ces sensations naît la pensée " je suis triste ", ensuite vient un jugement : "c'est désagréable".

Ce système d'étiquetage fonctionne en permanence.
La peur est là ? Hop, un tampon  j'ai peur.
Et la faim ? idem, un tampon  j'ai  faim.

En fin de compte, je est une étiquette posée sur tous les phénomènes intérieurs et extérieurs qui nous touchent.

C'est pour cela qu'il est introuvable !

Oui, je ne désigne rien de fixe puisqu'il s'applique à tout.

L'esprit se raconte des histoires. La nuit, ce sont les rêves.
Le jour, c'est l'histoire d'un “ je ”, identique à lui-même, vivant tranquillement dans un corps en perpétuel changement .

 A ton avis, à quoi sert ce sentiment d'être un moi immuable que l'on appelle je ?

Il sert à assurer l'unité et la continuité du corps malgré ses changements. Il permet d'unifier toutes les expériences qui se produisent dans le corps et l'esprit. A un autre niveau, il nous permet de vivre en société et d'interagir avec les autres. Pas mal pour une illusion !






                             CHAPITRE III





Le fait de reconnaître que le père Noël n'a jamais existé, à part en pensées, ne change rien à la réalité de la cheminée, des cadeaux et des enfants. Comment sais-tu que le père Noël n'existe pas ?

Parce qu'il est introuvable.
Personne ne l'a jamais vu voler sur son traîneau tiré par des rennes.
Parce que l'histoire qui se raconte à son sujet est impossible.
Un seul homme ne peut pas distribuer des cadeaux à tous les enfants du monde en une seule nuit.

Eh bien, pour le je, c'est la même chose. Il est introuvable. L' histoire d'un je fixe, permanent, stable, présent dans un organisme vivant, en perpétuelle transformation depuis l'enfance est une histoire impossible.

Mais, peut-être, faut-il préserver cette croyance ?
Peut-être est-ce dangereux de chercher à dissiper cette illusion ?

Qu'est-ce qu'une illusion ?
C'est une apparence trompeuse, en dehors de la réalité.


Ici, les lignes paraissent courbes alors qu'elles sont droites.
Là, le moi semble trouvable, fixe alors qu'il ne l'est pas.

L'illusion est bien là, devant nous. Impossible de ne pas voir les lignes courbes.
Mais ce qu'elle montre n'existe pas réellement : Il n'y a jamais eu de lignes courbes.
L'illusion est une fausse perception: la perception est bien là, mais elle est fausse.

C'est la même chose pour l'illusion de l'ego. Impossible de ne pas avoir la conscience de soi. En permanence, le cerveau crée l'illusion d'un sujet qui serait l'auteur des pensées ou le témoin observant les pensées. Continuellement, nous avons le sentiment d'être un agent autonome.

A quoi sert cette illusion ?

Se vivre comme une personne autonome garantie notre survie. La conscience de soi ne s'arrête jamais. L'ego est une illusion qui apparaît continuellement pour permettre à l'organisme vivant de se réguler, d'évoluer et de survivre parmi les autres.

Le sentiment d'être un moi autonome a même une conséquence importante. Les autres aussi sont des personnes autonomes. Nous pouvons donc les tenir responsables de leurs actes et respecter leurs droits. On ne les considère pas comme des machines. 

C'est vrai. Si j'ai le sentiment d'être libre, alors les autres le sont aussi. Ce ne sont ni des objets, ni des robots, ni des esclaves.

Quand les gens agissent par accident ou sous la contrainte, je ne peux pas dire qu'ils se sont mal comportés. Seuls leurs actes volontaires peuvent être injustes. Ainsi, mon sentiment de justice repose entièrement sur cette impression d'être une conscience libre et autonome.

N'est-il donc pas crucial de nous percevoir comme des agents libres ?

Oui, c'est essentiel pour vivre avec les autres. Dès l'enfance, nous apprenons à jouer le jeu du moi, à reconnaître nos parents, nos proches, à répondre à l'appel de notre nom. Face à nous, il y a bien des personnes. Face au miroir, il y a bien une conscience. Mais nous allons trop loin. Nous croyons notre identité personnelle aussi solide que la pierre et nous vivons comme si c'était vrai.

L'identité personnelle est construite sur du sable. 

Au lieu de l'accepter et d'être libre de changer, nous nous accrochons à cette construction imaginaire.

Que se passe-t-il quand nous reconnaissons l'illusion de l'ego ?

Nous pouvons vivre en accord avec la réalité, sans se raconter d'histoire au sujet d'un je solide et durable. Il n'y a pas d'identité fixe. Il n' y a donc pas d'obligation à rester figé ou à s'accrocher à notre identité. 

Un ennui et nous pensons " Pourquoi est-ce que cela m'arrive à moi ?"

Quelqu'un a de la chance et nous nous lamentons: " Pourquoi cela ne m'arrive jamais à moi ? "

D'où vient ce type de pensées ?

D'une activité mentale très particulière, uniquement centrée sur le moi. Pour la plupart d'entre nous, cette activité tourne à plein régime, du matin au soir, toujours préoccupée par ce moi si spécial, si unique, si différent des autres.

Cette activité est néfaste ?

Oui, car elle conduit au stress, à la colère, parfois à la violence. 

Un jour, un soldat se présente devant une veille femme en train de prier.
Il lui demande :
- " Crois-tu à l'enfer ? "
- " Qui es-tu ?" répond la veille femme
- " Je suis un soldat "
- " Toi, un soldat ! s'exclame-t-elle. Mais regarde-toi. Tu es minable, tu as l'air d'un mendiant."
- " Que dis-tu ? Moi, minable ? Moi, un mendiant ?!! "

La colère s'empare du soldat. Il saisit son arme, prêt à tirer.
Alors, la veille femme dit :
- " Ici s'ouvre la porte de l'enfer."

Des émotions puissantes naissent d'une pensée centrée sur le moi, sur ce qu'il est ou n'est pas, sur ce qu'il mérite ou non.

Des désirs, des peurs, des jugements naissent aussi de ce sentiment d'être quelqu'un de stable, d'unique, de spécial, presque le centre du monde.

Moi, j'ai peur d'être rejeté, dit l'un 
Moi, je suis le meilleur, dit l'autre
Moi, je suis nul, pense un troisième

Mais, au final, qu' est ce que ce moi ?

Rien de fixe

C'est le constat qu' a fait le physicien autrichien Ernst Mach en 1922.


 Dans L'analyse des sensations, il écrit :
“ Je peux m'occuper de telle ou telle chose, être calme ou gai, furieux ou de mauvaise humeur. Malgré cela, il reste suffisamment de choses stables pour me reconnaître comme étant le même. Mais mon apparente stabilité réside uniquement dans la continuité, dans la lenteur avec laquelle je me transforme. Car je ne suis pas une chose une, inaltérable. Je ne suis que la réunion d'éléments différents que, par économie de pensée, je nomme moi.”

Une fois compris cela, l'inquiétude pour ce moi illusoire peut disparaître.

Et la conscience de soi continuer à apparaître quand même !

Bien sûr, seulement il faut faire attention. Il ne faut pas remplacer la croyance "Moi, je suis plus que le corps et l'esprit " par une autre toute aussi fausse : " Je n'existe pas du tout ".

Car, en réalité, il y a bien un homme, ici et maintenant.
Il est vivant comme l'abeille, l'ours ou le papillon. Il agit, se nourrit, aime, déteste, marche et respire, pense et ressent. Il occupe un espace dans l'univers que personne ne peut occuper à sa place. Ses cellules se renouvellent en permanence, plus ou moins vite, des cellules de la peau aux globules rouges. L'eau qui le compose se renouvelle aussi.

Cet homme est incroyable, il est vivant et a conscience d'exister. Un vrai miracle.

Mais il n' a aucun moi fixe, stable, permanent ou immortel.

Oui, et c'est pour cela que cet homme est en vie.
La matière a la faculté d'engendrer une chose très différente d'elle-même : la vie.
Les êtres vivants, bien qu'étant constitués de molécules sans vie, possèdent des caractéristiques absentes de la matière inerte.
Six caractéristiques permettent de tracer une ligne entre le vivant et le non-vivant : la complexité, l'organisation cellulaire, le métabolisme, l'homéostasie, la reproduction et l'hérédité.
Sais-tu ce qu'est l'homéostasie ?

Non.

 C'est l'équilibre dynamique qui nous maintient en vie.

Comment ?

C'est l'équilibre entre les entrées continuelles - la nourriture, l'eau, l'oxygène -  et les sorties incessantes - les excréments, la sueur, le gaz carbonique - qui permet de rester en vie.
Des entrées, des sorties, tout se modifie en permanence. Tout sauf toi ?

Non, c'est impossible. Mais pourquoi est-ce si difficile à accepter ? Qu'est-ce qui me pousse à vouloir plus que ce que montre la biologie ?

Sûrement, le sentiment permanent d'être un agent autonome, l'impression tellement forte, tellement puissante d'être un esprit différent du corps. C'est cette perception qui te pousse vers toutes sortes de croyances, pour peu qu'elles te rassurent et te confortent dans la certitude d'être un sujet stable : "J'ai une âme","Je retrouverai mes proches dans l'au-delà", "J'ai une identité fixe".

Je me sens triste, maintenant.

Pourquoi ?

Comprendre qu'il n' y a pas d'âme, pas de moi qui pourrait survivre à la mort, c'est triste de comprendre cela. “ je ” est une illusion. Le père Noël continuera –t-il sa vie, une fois mort, dans l'au-delà ? C'est absurde. Croire que cette illusion continue après la mort serait doublement illusoire.

Alors, du coup, tu crois que les êtres humains n'existent pas du tout ?
Que rien n'existe vraiment ?

Oui, j'ai cette impression.

Regarde la réalité, avant de croire n'importe quoi !

Chaque être humain existe, chaque forme de vie existe.
Tu peux les voir, les toucher, leur parler. Ils existent autant que toi.
Tu peux jouer avec tes enfants, tu peux vivre avec tes amis, tu peux aimer une femme ou un homme.

Il ne suffit pas de voir qu'il n'y a pas de je fixe, il faut aussi comprendre ce qu'il reste.

Lorsque tu regardes un petit enfant, tu peux dire :"c'est un beau bébé" quand il a trois mois. Mais continueras-tu à dire :" C'est un bébé" quand il aura vingt ans ? Non, tu verras un beau jeune homme. Il aura grandi, il aura changé, il n'aura toujours pas de je fixe mais il sera là devant toi en chair et en os, bien vivant.

Aurais-tu préféré qu'il reste un bébé de trois mois pour toujours ?
Aurais-tu préféré qu'il ne change jamais ?

Regarde.
C'est parce qu'il n'y a pas de je fixe, immuable que la vie est possible pour tous les êtres vivants.

Quand on présente à l'esprit cette pensée " Il n'y a aucun moi fixe", que se passe-t-il ?

Il peut y avoir un refus : " Non, c'est faux, c'est contraire à ce que disent les prêtres, les textes sacrés, les médiums. J'ai une âme et j'irai au paradis. Et même s'il n'y rien après la mort, c'est contraire à ce que je ressens."

Ou de la colère: " C'est quoi cette idée qui fait de l'homme un néant ! C'est n'importe quoi, c'est dangereux pour la jeunesse et désespérant pour la vieillesse."

Ou simplement de la tristesse: " Il n'y a donc pas de vie après la mort. "

Sais-tu ce qui est vraiment triste ?

Craindre pour son Salut, vivre dans la peur ou l'exaltation, être intolérant, péremptoire, sectaire, restreindre la liberté, juger, condamner, faire le mal, tout cela pour sauver un moi qui n'existe pas. Voilà ce qui est vraiment triste.
Alors, c'est vrai, comprendre l'illusion de l'ego peut apporter de la tristesse mais cela ne dure pas. Pourquoi ?

Peu à peu, l'esprit s'accorde avec la réalité.
Il n' y a plus ce mensonge qui nous pousse à rechercher les honneurs ou à écraser les autres. L'orgueil tombe de lui-même, car qui est ce je qui se vente, qui rapporte tout à lui ? Rien, juste une croyance dans l'esprit.

Regarde cet arbre.


Il ne possède pas d'existence indépendante: Il se dissout en un réseau de relations s'étendant à l'univers entier : la pluie qui tombe sur ses feuilles, le vent qui l'agite, le sol qui le nourrit et le fait vivre, les saisons et le temps, la lumière du soleil - tout cela fait partie de l'arbre.

Tout l'univers contribue à faire de l'arbre ce qu'il est.

Il ne peut à aucun moment être isolé du reste du monde et à chaque instant, il se modifie imperceptiblement.

Mais que se passe-t-il  quand il meurt ? Va-t-il au paradis des arbres ? Y ' a-t-il un au-delà pour lui ?
Non, bien sûr.
Alors, pourquoi accorder aux hommes ce qui paraît impossible à accepter pour les arbres et même pour les animaux, connaissant ce qu'ils sont vraiment ?
Sommes-nous différents d'eux ? 

Non. Partout, ce sont les mêmes mécanismes. Partout, les gènes sont à l’œuvre pour préserver l'équilibre dynamique du corps. Des entrées continuelles, de la nourriture, de l'eau, de l'oxygène et des sorties incessantes, des excréments, de la sueur, du gaz carbonique. Tout cela, pour maintenir l'équilibre du corps, l'homéostasie.

Tout l'univers contribue à faire de l'homme ce qu'il est, n'est-ce pas suffisant ?
Que faut-il de plus ? une âme ? un moi éternel ?

Qu'est-ce qu'un homme ?
206 os, 640 muscles, 100 milliards de neurones, 100 000 milliards de cellules de 200 types différents qui arrivent à fonctionner ensemble. Et pourtant, tranquillement, sans aucune hésitation, à chaque action de ces innombrables cellules, nous disons " Je ".
Je mange, je ris, je respire, je pense, je suis ému.
Sommes-nous vraiment là, plantés au sommet d'une montagne de cellules, à les regarder fonctionner pour nous ou est-ce une illusion ?

Sur une vie, de l'enfance à la vieillesse, cinquante tonnes de nourriture nous traverse et nous transforme. Cinquante tonnes !  En 24 heures, nous inspirons huit mille litres d'air et des centaines de milliers de cellules sont renouvelées. Et, pourtant, à la fin d'une journée, nous pourrions affirmer sans rire à qui veut l'entendre  " Ce soir, je suis la même personne que ce matin  ".

Comment est-ce possible ?
Tout changerait, tout se renouvellerait, des cellules à l'eau qui me compose, des pensées aux émotions qui me traversent, tout sauf moi ?

La conscience de soi permet quelque chose d'extraordinaire.

Grâce à elle, tous les phénomènes intérieurs et extérieurs qui nous touchent, aussi variés soient-ils, peuvent être rattachés à une seule entité, réunis sous le même étendard: je.
Et c'est bien pratique. Je vois, je chante, je comprends, je suis ému. Toujours je, je, je, utilisé en permanence et qui s'applique à tout. Je ris, je bronze, je parle, je digère. Voilà un mot commode pour unifier l'ensemble. A force d'être appelé par un prénom, à force de dire je, l'esprit croit fermement en l'existence d'un moi, tel un génie dans une bouteille ou un prisonnier dans sa cellule.

Mais qu'observe-t-on en réalité ?

Lorsqu'on le cherche, ce "je" est introuvable. C'est une illusion, un mirage.




La perception de soi est continue, nécessaire, mais elle est fausse. Il n'y a jamais eu et il n'y aura jamais de moi fixe, stable ou immortel. L'illusion est irrésistible mais elle n'est pas indissoluble. 

A présent, la croyance d'être un moi fixe s'est-elle effondrée ?

Oui et avec elle, la croyance d'une vie dans l'au-delà pour ce moi. Plus de réincarnation, de renaissance ou de karma. Aucun paradis, aucun enfer, juste une vie brève et incroyable.

Qu'est-ce que je ?

Le moyen de désigner un organisme vivant, aussi éphémère et changeant qu'un arbre ou un oiseau.

Exactement ! Aucun soi pour l'arbre ou l'oiseau, aucun moi pour nous.

La croyance d'être un moi fixe s'est effondrée, mais l'impression d'être un moi est toujours là.

C'est normal. Les yeux voient, les oreilles entendent, les mains touchent. C'est leurs rôles. Impossible qu'il en soit autrement. Le cerveau, lui, a la faculté de créer la conscience de soi. Alors, il fait son travail. Il maintient cette impression d'être unique, d'être séparé des autres, de rester identique à soi-même malgré le temps qui passe.

Je ne crois plus avoir un moi fixe mais je suis toujours là, planté au sommet d'une montagne de cellules à les regarder fonctionner pour moi : hématies, macrophages, fibroblastes, mélanocytes... des milliards de cellules et moi, au sommet me demandant qui je suis ?
Ne suis-je que le rêve de toutes ces cellules ?
Ne suis-je qu'un processus cérébral commode ?
Cette impression d'être unique, d'être séparé des autres, de rester identique à soi-même est tellement forte !

Oui et heureusement. Comme tu n'es ni schizophrène, ni sous l'emprise d'une drogue, ta conscience de soi n'est pas déréglée. Tu sais que le moi est une illusion mais, intimement, naturellement, continuellement, tu te ressens toujours comme un moi libre et autonome.

Alors, bien sûr, tu pourrais modifier cette conscience, un peu de LSD et voilà le moi dissout, beaucoup de cannabis et voilà Tu es Dieu.

Baudelaire, dans les paradis artificiels, observe parfaitement l'inflation du moi sous l'emprise de la drogue.

" Voilà donc mon homme, arrivé à ce degré de joie et de sérénité où il est contraint de s'admirer lui-même. Toute contradiction s'efface, tous les problèmes philosophiques deviennent limpides, ou du moins paraissent tels. Une voix parle en lui (hélas! c'est la sienne) qui lui dit: «Nul ne connaît et ne pourrait comprendre tout ce que tu penses et tout ce que tu sens. Tu es un roi que les passants méconnaissent. »

Suivrai-je plus loin l'analyse de cette monomanie ? Expliquerai-je comment, sous l'empire du poison, mon homme se fait bientôt centre de l'univers ? Ne devine-t-on pas la fin ? Tous les objets environnants sont autant de suggestions qui agitent en lui un monde de pensées, toutes plus colorées, plus vivantes, plus subtiles que jamais et revêtues d'un vernis magique.

« Ces villes magnifiques, ces beaux navires, ces musées, ces bibliothèques, ces instruments rassemblés qui parlent avec une seule voix, ces femmes enchanteresses, toutes ces choses ont été créées pour moi, pour moi, pour moi ! Pour moi, l'humanité a travaillé, a été martyrisée, immolée, - pour servir de pâture, à mon implacable appétit d'émotion, de connaissance et de beauté ! » 

Je saute et j'abrège. Personne ne s'étonnera qu'une pensée finale, suprême, jaillisse du cerveau du rêveur: «Je suis devenu Dieu ! » "

La conscience ordinaire se tient loin de ces deux extrêmes, ni un néant total, ni un Absolu rêvé.

C'est vrai. La conscience humaine est limitée, fluctuante.
C'est une conscience unifiée, certes, mais une conscience sélective - qui n'a pas accès à toutes les activités cérébrales - ; une conscience exclusive - qui ne peut pas voir ou faire deux choses à la fois -. A l'usage, cette conscience humaine n'est finalement pas si mal.

Entre n'être rien, sans conscience de soi et être Tout, être Dieu, il y a la place pour être un homme, non ?












                             CHAPITRE IV





Mais puisqu'il n'y pas de moi trouvable, il n'y a rien auquel se raccrocher. C'est le vide, c'est terrifiant.

Regarde ce qu'il se passe.
Tu crois cette pensée :" Puisque je est introuvable ... alors je ne suis rien du tout ".

C'est faux parce que, là aussi, c'est contraire à l'observation. Quand disparaît la croyance en un je fixe, l'esprit se trouve face à un grand vide. Il semble n'y avoir plus rien auquel se raccrocher. La croyance en un je fixe a disparu et pourtant... tu es encore là bien vivant. Quelle chance !

Toujours là, bien vivant et conscient.
Voilà une chose incroyable: Avoir conscience d'exister.
Ce n'est pas donner à tout le monde.
Beaucoup d'êtres vivants n'ont pas cette chance.

Il y a ce vide, c'est vrai, mais il n'a rien de terrifiant. Il ressemble à l'espace autour de toi, qui peut accueillir toutes les choses visibles, justement parce qu'il est vide.

J'ai peur de disparaître. J'ai peur de ne plus exister du tout. 


Percevoir l'illusion du moi n'est pas un remède miracle. Cela n'a jamais nourri ou habillé personne. Ça ne donne pas de travail, ça ne lave pas le linge, ça ne rends pas intelligent, ça n'apporte pas la fortune, ça ne fait pas disparaître la maladie.

Mais cela relâche l'attachement , cela donne de l'air, de l'espace. Toutes les pensées centrées sur ce petit moi, si important auparavant, perdent peu à peu leur intérêt.


L'esprit devient plus calme.
















Il passe à autre chose. Il arrête de divaguer et de croire n'importe quoi. Il peut même se tourner vers l'univers tel qu'il est. La joie de regarder et de comprendre est le plus beau cadeau de la nature. 

Une fois l'illusion du moi percée à jour, que reste-il ?


Tout le vivant et l'univers, là, devant nos yeux. 14 milliards d'années, des galaxies, des bactéries, l'ADN, la conscience, la lumière, la musique, les forêts et la neige (entre autres).

Percevoir l'illusion du moi n'empêche pas d'écouter de la musique, de s'étonner du monde, d'apprécier un film, de s'engager, de créer, de partager, de rire. En fait, ça n'empêche pas de vivre, au contraire.

Mark Twain disait avec humour : « J’ai eu beaucoup de problèmes dans ma vie dont la plupart ne sont jamais arrivés ! ». Son esprit fut préoccupé et inquiet jusqu'à ce qu'il réalise qu'il n'était jamais si malheureux qu'il croyait, ni si heureux qu'il l'avait espéré. 

Quand l'illusion de l'ego est vraiment observée, l'inquiétude pour ce moi illusoire disparaît. Alors on peut vivre et apprécier ce qui nous rend heureux ici et maintenant. Il y a toujours des êtres à aimer et des choses à faire.

Je vois le constat " je est introuvable " comme un remède mais ne serait-il pas un poison s'il est mal compris ?

C'est vrai.
Cela semble une voie dangereuse car il peut naître des pensées erronées :

je est une illusion,  rien n'a donc d'importance...
La vie n'a aucun sens...
Quand je vois souffrir quelqu'un, il n'y a personne qui souffre, ce n'est donc pas si grave...

Mais toutes ces pensées naissent d'une erreur de compréhension. Le médicament s'est transformé en poison parce que la dose était trop forte.
Quand on observe attentivement, il n'y a aucun moi trouvable, aucun je fixe nulle part. Il n'y en a jamais eu, ni pour toi, ni pour ta famille, ni pour tes amis, ni pour aucun être vivant. Ce je est introuvable car il n'existe pas tel que tu le crois. Est ce dangereux de comprendre cela ?

Non, sauf si l'on va trop loin, sauf si l'on oublie que chaque homme est un être vivant, sensible au plaisir et à la douleur, ressentant la joie et la souffrance.
Rappelle-toi.

Il ne suffit pas de voir qu'il n'y a pas de moi, il faut aussi comprendre ce qu'il reste.

Ce moi fixe, immuable n'existe pas et n'a jamais existé.
Ce qui reste, c'est un être sensible et conscient. Pas moins mais pas plus.
Il y a cela : la vie en mouvement et la conscience d'être en vie. Un vrai miracle. 

Serions-nous plus proches les uns des autres si nous découvrions qu'il n'existe aucun moi fixe, stable ou immortel ?

Oui, car nous serions en accord avec la réalité. Certaines croyances ne pourraient plus nous diviser. Regarde. Que deviendraient les religions si elles n' avaient plus personne à sauver, plus aucun moi à convertir ?

Elles disparaîtraient.

Oui, elles ne pourraient plus affirmer l'existence d'un moi fixe et lui promettre une vie dans l'au-delà.
Enlevons-leur ce moi. Que restera-t-il de sa mission divine, de son Salut ?

Rien. 

Qui ira combattre pour gagner un paradis où il n'ira jamais ?

Ainsi, nous n'existons pas ... tel que nous le croyons. Nous n'avons pas d'existence indépendante. Nous ne sommes pas coupés du reste du monde. Nous sommes vivants donc dépendants. 

Oui, nous sommes dépendants à tous les niveaux. Regarde les bactéries. Dans notre corps, il y a dix fois plus de bactéries que de cellules humaines. 10 puissance 15 bactéries contre 10 puissance 14 cellules. Que font-elles là, toutes ces bactéries ? Sont-elles en train de nous parasiter ?

Au contraire, les bactéries sont essentielles au maintien de la santé humaine. Elles permettent le bon fonctionnement de l'organisme. Celles du système digestif, par exemple, sont capables de décomposer les hydrates de carbone que nous ne pourrions pas digérer autrement.

Il y a aussi dans chaque cellule de notre corps des mitochondries. Sans elles, la cellule ne recevrait pas l’énergie dont elle a besoin sous forme d'adénosine triphosphate. Les mitochondries ont leur propre ADN, car, à l’origine, elles étaient des organismes unicellulaires distincts et autonomes, jusqu’au jour où une cellule décida d’avaler une mitochondrie, et se mette à vivre en symbiose avec elle.

Voilà un bel exemple d'interdépendance, mais, est-ce la même chose à notre niveau ?

Oui. Quand il n' y a plus de moi pour attirer l'attention, l'interdépendance de tous les êtres vivants, femmes et hommes inclus, apparaît clairement.

Personne n'existe sans les autres. De la naissance à la vieillesse, dans tous les aspects de notre vie, nous existons en dépendance. Nous dépendons des parents qui nous élèvent, de la société des hommes qui nous accueille. Sans eux pas de nourriture, pas de soins, pas d'éducation, pas de culture, pas d'affection.

Et surtout, nous dépendons entièrement du monde vivant, animal et végétal.

Il n' y a que le moi pour croire le contraire !
Nous commençons par affirmer : J'existe, je suis indépendant !

Et nous finissons par croire : Je ne dépend pas de la nature, je suis supérieur à elle.

Bien sûr, la nature n'est pas parfaite. Il y a des erreurs et de la douleur. Des animaux meurent pour que d'autres vivent. Pourtant, un équilibre se crée entre les espèces.

Des enfants souffrent de maladies, au hasard des mutations génétiques. Mais aucun d'eux ne paye pour un péché originel ou un mauvais karma. Ce sont simplement des êtres vivants, nés avec une maladie, qu'il faut guérir.

La plus grande part de notre souffrance ne vient pas de la nature, de ses tremblements de terre ou de ses maladies, mais directement de nous.
Nous avons donc le pouvoir de diminuer la souffrance.

Comprendre l'illusion de l'ego peut nous y aider ?

Oui, si l'attachement à ce moi illusoire se relâche, les actes et les croyances fondés sur lui s'amenuisent. Que reste-t-il alors ?

La conscience d'être vivant et l'étonnement d'être conscient.

Voici donc la dernière question



 Ami,




Maintenant,




En cet instant,




N'es-tu vraiment qu'une illusion ? 


La lune brille, unique, au-dessus des nuages

Les lacs au-dessous sont tous différents

Je vois la lune dans chacun d’eux !



                                                            ;-)

                                                  Sources bibliographiques 

Traverser la porte fantôme